Un leitmotiv…Vous savez ce que c’est ? Pour faire simple, c’est comme un slogan, un truc qu’on se répète et auquel on croit profondément (cf Dictionnaire du à peu près)…
J’aime beaucoup le « On nous tue, on ne nous déshonore pas » made in Sénégal…C’est profond! C’est un cri du cœur.
Un peu comme le « Naître noir(e) et mourir métisse », objectif et leitmotiv de nos frères et sœurs adeptes de la Tchatcholi, du Xessal, du maquillage…Bref, de la dépigmentation quoi!
Entre ceux qui utilisent les moyens les plus absurdes qui soient (Eau de javel oh, verre pilé oh) et les « bourgeois » avec leur phrase fétiche « Je ne me dépigmente pas, j’améliore mon teint! », entre ceux qui achètent leur mixture au marché du coin et ceux qui dévalisent les pharmacies…Le combat est le même : « Naître noir(e) et mourir métisse ».
Retour sur la petite histoire d’une très vieille pratique
A la fin des années 60, des ouvriers noirs travaillant dans le domaine du textile et du caoutchouc sont constamment en contact avec l’hydroquinone, substance utilisée pour le délavage des Jeans ou comme antioxydant sur le caoutchouc. Travaillant sans protection, ils remarquent à la longue que ce produit les « blanchissait » eux aussi.
Ainsi naissait la dépigmentation qui, naturellement, se propagea très vite au sein de la communauté noire puis sur le continent africain. A cette époque déjà, le noir était une couleur qui dérangeait.
Pratiquée dans plusieurs pays africains, la dépigmentation ou éclaircissement de la peau trouve ses principaux ambassadeurs au Sénégal, en Cote d’Ivoire, en Afrique du sud et dans les deux Congo où cette pratique est devenue un sport national, toutes catégories confondues.
Qu’on l’appelle donc Tchatcholi (Cote d’Ivoire), Kopakola (Congo Brazza et RDC), Khessal (Sénégal) ; la dépigmentation est devenue quasiment normale au sein de certaines sociétés car avant, les gens s’en cachaient. Aujourd’hui, on échange les bons procédés.
Les hommes préfèrent les femmes blondes claires…
En 2013, Khardiata Pouye, jeune réalisatrice sénégalaise sortait un documentaire sur la dépigmentation au Sénégal ; « Cette couleur qui me dérange » (A suivre ICI). Dans ce film de 26mn, une dame déclarait :
« Je me sens valorisée lorsque je suis claire. Les hommes ne regardent pas les femmes noires, ils aiment les femmes claires ».
Un peu comme le fameux dicton qui veut que les hommes préfèrent les blondes. Malheureusement, elle n’est pas la seule à penser ainsi.
Je me souviens d’ailleurs d’une fête de Tabaski où une amie m’avait invitée à aller dans sa famille. Mon premier choc fut de voir la différence flagrante de teint entre ses sœurs et elle. Elles étaient toutes claires, veines presque visibles. Ma copine était noire, comme une bonne serère (Ndlr : Ethnie sénégalaise).
A peine assise autour du bol, l’ainée de ses sœurs m’avaient taquinée en disant que je ne trouverais jamais chaussure à mon pied si je restais noire.
J’avais rigolé. Poliment.
En fait, je ne sais pas si il faut rire ou pleurer, j’en suis arrivée à regarder ces faits sans trop savoir comment réagir.
Baladez-vous dans les rues de Dakar, vous verrez que la « femme noire » que chantait Senghor est désormais en voie de disparition. Partout – ou presque – vous verrez des nymphes à la couleur de peau incertaine. Black or White ? Difficile à dire.
Complexé(e)s… Non ! Bien sûr que non !
Il y’a un an, j’ai eu une dispute avec une amie parce que je lui avais clairement dit que je pensais que le fait qu’elle se dépigmente était la preuve qu’elle était mal dans sa peau, complexée par la peau blanche du colonisateur.
Elle m’avait répondu : « Quoi ? Moi, complexée ? Même pas ! Je fais ça pour moi avant tout ».
Faux.
La société, inconsciemment, nous apprend que ce qui est beau vient de l’Occident. La preuve, ouvrez vos magazines, allumez vos télévisions… Faux cheveux, standard de beauté régulée par nos sœurs d’Europe, mode occidentalisée à outrance et peau blanche.
Mieux, tournez-vous vers le Christianisme – par exemple – où toutes les représentations (à des exceptions près) ont la peau blanche.
Je ne suis pas dans le mouvement des « Bring back our Africa » et compagnie (Trop la flemme pour ça en vrai) mais la vérité est là : Nos modèles aident à créer un complexe quant à notre propre représentation du beau.
Sur nos chaines de télévisions NATIONALES, les présentatrices vedettes sont toutes dépigmentées. Ou métissées.
Nos stars de la chanson ont toutes un teint « trafiqué » par l’utilisation de produits hors prix.
Les publicités dans nos rues vantent des laits de toilette où l’égérie montre un avant/après douteux où la peau passe d’un noir cacao à un jaune poussin (Oui, j’exagère un peu ! ).
Ce que je veux dire c’est que l’Afrique même est entrain de se « laver », de se « javeliser », de se « dépigmenter »…Dans quelque temps j’ai bien peur que les rares « teints noirs » deviennent des marginaux au sein d’une société qui aura oublié que « Black is beautiful ».
Et la santé dans tout ça ?
C’est la question que j’ai posé à une amie qui dépense mensuellement des sommes faramineuses pour s’acheter des injections de glutathione afin de garder son teint de semi-porcelaine.
Inquiète donc (pour elle et pour son porte-monnaie), je lui ai demandé.
- Moi : Et ta santé dans tout ça ?
- Elle : Akkaaa… Si c’était aussi dangereux que ça se dit, on ne vendrait pas ça…
- Moi ; Mais tu te dépigmentes, c’est pas sûr.
- Elle : Je ne me dépigmente pas, j’arrange mon teint.
THE phrase.
Excusez- moi mais je ne saurais terminer ce billet sans parler de celles qui, au lieu d’assumer simplement ; nous sortent des « théories de l’amélioration de teint ». Les go sont devenues tellement forte dans leurs justifications qu’elles se croient devenues pharmaciennes.
Mes frères camerounais vous diront : « Il n’y a pas de mouiller sec ». Je traduis : Soit tu es dedans, soit tu n’es pas dedans.
Je commence même à m’emporter.
Heureusement qu’il y a des initiatives qui font sourire et qui me touche. Au Sénégal où je vis, le « black is beautifull » est promu via d’excellentes initiatives comme le Nuul Kukk ou plus récemment, la campagne #DontTouchMyMelanine de mon coup de cœur beauté, Ines LOWE.
Avant de partir…Mention toute spéciale aux avocats de la partie adverse. S’il vous plait, épargnez-nous les comparaisons du style : « Ça revient au même. Y’en a qui mettent bien des faux cheveux… ». Je connais la chanson. Par cœur.
On en reparlera.
Je disais donc au début de mon propos que nombreuses sont celles (et ceux) qui ont pour objectif de devenir métisse. Ou claire. Ou de s’en rapprocher au moins.
Vous connaissez le dicton non ? « Naître noir(e) et mourir métisse ».
Que DIEU vous aide.
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